« Outrage à magistrat » d’une part et « abus d’autorité » d’autre part, telles sont les thèses soutenues par deux camps opposés impliqués dans un récent événement judiciaire qui a bousculé la toile et fait couler de l’encre.
Mais, qui est cette personne faisant pont entre ces deux camps ?
Vous l’aurez sûrement deviné, (du moins pour une bonne partie d’entre vous), il s’agit de Rebecca Enonchong, cette femme au profil saisissant qu’aujourd’hui nous allons -mieux- découvrir.
Qui est Rebecca Enonchong ?
Le Cameroun est le premier lieu géographique phare en ce qui concerne notre héroïne du mois. Née et y ayant grandi, Rebecca Enonchong est la fille du Dr. Henry Ndifor Abi Enonchong, un célèbre avocat camerounais et d’une mère américaine.
Seconde destination importante, les États-unis d’Amérique. Pendant son adolescence, Rebecca y déménage avec ses parents. À 17 ans, elle devient manager dans une entreprise où deux (02) ans plus tôt, elle vendait en porte-à-porte des abonnements aux journaux.
À la fin de ses études et après avoir travaillé pour certaines organisations dont la Banque Inter Américaine de Développement (Bid) et Oracle Corporation, elle y fonde (précisément à Bethesda au Maryland), la société Apps Tech. Société qui a pour objectifs essentiels, le conseil en systèmes et logiciels informatiques et la fourniture des solutions globales pour les applications d’entreprise.
Bien que ne se présageant pas un avenir dans la sphère de la technologie (car elle a fait des études en économie), c’est sa passion pour les technologies d’information et la communication qui l’a finalement amener à cette carrière.
Elle suivra donc des cours de renforcement de capacité chez Oracle, qui seront marqués par l’obtention de différentes certifications dans la finance, le management et le e-business.
Au début des années 2000, l’entreprise s’étend un peu partout et en Afrique, se soldant par l’ouverture de filiales au Ghana et au Cameroun. Même si certaines de ces expériences furent difficiles conduisant à la fermeture de quelques filiales, la société continue son avancée, et son travail est reconnu.
Enonchong a été la lauréate de divers prix auprès d’organisations tels que leader mondial de demain au Forum Économique Mondial de Davos en Suisse; entrepreneur africain de l’année en 2001 ; finaliste de la Femme africaine digitale de l’Année en 2013 ; WIE (les Femmes, l’Inspiration et le Réseau de l’Entreprise) – 2013. Forbes la classait parmi les 10 Femmes Tech Fondateurs à observer en Afrique durant l’année 2014; en 2020 parmi les 50 femmes les plus influentes d’Afrique(et ils ont eu raison, car jusqu’à ce jour, elle continue de réaliser de belles performances dans ce milieu où la présence masculine est forte).
Que fait-elle ?
Entrepreneure dans le secteur des nouvelles technologies, Rebecca Enonchong est l’une des figures fondatrices d’Apps Tech, une entreprise spécialisée dans les logiciels informatiques professionnels. Elle intervient également en tant qu’experte et conseillère auprès de plusieurs starts-up dans le domaine des technologies innovantes.
Grande voix du numérique en Afrique, elle milite principalement pour que la révolution digitale prenne comme cela se doit en Afrique. Elle influence et incite beaucoup de jeunes africains (notamment) à entreprendre et innover dans ce domaine.
Elle a pour ce fait, co-fondé deux grands réseaux: Afrilabs et ActiveSpaces (dont elle est présidente du conseil d’administration). Le premier est un réseau panafricain comptant plus de 50 centres d’innovations et le second un incubateur d’entreprise au Cameroun.
Elle est également cofondatrice et PDG de I/O Spaces, un espace ouvert de co-working dans la Région métropolitaine de Washington DC. Elle est cofondatrice et présidente du Cameroon Angels Network et cofondatrice et vice-présidente de l’African Business Angels Network.
Elle continue de créer des entreprises, aide des starts-up et promeut les technologies en Afrique. Le numérique, pour elle constitue une priorité à une économie inclusive et durable.
Le principal frein à la révolution digitale en Afrique, c’est la frilosité des dirigeants politiques.
Rebecca Enonchong lors d’une interview de l’iD4D.
Moins de bureaucratie et plus de confiance des dirigeants, telles sont pour elle, les conditions d’accélération de la révolution digitale en Afrique.
Elle expose un peu l’impact du numérique et ce qui motive son engagement pour cette cause dans une interview que vous pouvez trouver Ici.
Rebecca Enonchong utilise pour élargir son champ d’impact, le réseau social Twitter. Son tag est @Africatechie. Elle est suivit par des milliers d’abonnés (n’oubliez pas de la suivre, parce que cela en vaut la peine).
Mais encore…
Influente au-delà du domaine du numérique, elle fait aussi entendre sa voix dans le combat contre les injustices sociales.
Elle a mené avec véhémence la mobilisation #BringBackOurInternet en 2017, lorsque le gouvernement eut coupé l’accès à internet dans les régions anglophones en proie à une importante crise sociopolitique.
La digital woman est en outre, connue pour son inimitié patente par rapport au gouvernement (que dis-je, à la monarchie) en place, celui de Paul Biya. Elle dénonce souvent d’énormes irrégularités qui seraient monnaie courante dont la corruption, les arrestations arbitraires, d’opposants, de journalistes, de militants…, de même que la mauvaise gestion du conflit existant dans certaines régions de la partie anglophone du Cameroun.
Elle a dans un passé récent participé à la dénonciation par écrit, avec certaines personnes de son pays, du covidgate. Elles ont de ce fait saisit le Fond Monétaire International (FMI) pour demander qu’une enquête soit mené sur le détournement des aides versées au Cameroun pour faire face au Covid-19, et le Conseil de Sécurité de l’ONU pour intervenir dans les conflits qui sévissent dans la partie anglophone de l’État.
C’est cette position de militante opposante, qui lui aurait valu un ticket visite pour un séjour de trois (03) jours dans les suites de la Police de Douala.
S’étant rendue de sa propre initiative à la cour d’appel du littoral à Douala pour s’enquérir des avancées sur les enquêtes portant sur un litige familial, elle aurait demandé au procureur de procéder à la jonction des affaires ayant un lien, ce suite à quoi le procureur aurait qualifié son comportement de cavalier et demanda son arrestation pour motif d’outrage à magistrat.
Informés de la nouvelle, suivit une vague d’indignation de certaines personnalités (de divers secteurs) du pays et même de la scène internationale qui voit en cette action, un abus d’autorité. Pour ces derniers, l’outrage à magistrat évoqué ne serait qu’un prétexte pour faire d’elle une victime de plus des arrestations arbitraires dont le pouvoir en place serait très friand.
Alors que nous sommes en train de travailler à la faire sortir, on a l’impression que d’autres personnes font tout pour qu’elle soit maintenue en garde à vue sur la base de ses critiques envers le régime.
Propos, de Kah Walla, présidente du Cameroon People’s Party(CPP, opposition), recueillis dans l’édition de « Le Monde » du 13 août 2021.
Pas de bol cette fois-ci, dira t-on pour eux car le hashtag #FreeRebecca devient viral en quelques heures sur les réseaux et la presse internationale même s’y intéresse.
Un regard pesant est alors tourné vers le Cameroun, ce pays où des droits fondamentaux sont bafoués.
À cette pression énorme, la justice (😒) Camerounaise cède et Rebecca Enonchong est libérée grâce à ces hommes et toutes ces femmes qui se sont dressés comme une seule personne pour dire non.
Ne dit-on pas qu’un mal ne vient jamais seul ? Eh bien oui.
Même si pour d’aucuns, cela voudrait dire que plusieurs maux s’en suivront, je pense au contraire que partout où le mal pointe son nez, le bien n’est jamais bien loin.
C’est bien grâce à ce mal que la notoriété de Rebecca @Africatechie a connu un autre bond, et que plusieurs regards se sont tournés non seulement sur sa personne, mais également sur son magnifique travail.
N’oubliez pas qu’être une femme est déjà un atout. Ayez confiance en vous et soyez audacieuses.
Agoodojié !
1 réflexion au sujet de “Rebecca Enonchong, un mastodonte du high tech africain.”