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Les dreadlocks: origine et représentation socio-culturelle

Existant depuis la nuit des temps, largement popularisée par les célébrités rastafari, objet de mépris et de rejet, ou de fierté et liberté, la coiffure dreadlocks est devenue aujourd’hui un incontournable de la mode. Anciennement portée par les rois, elle est arborée de nos jours par des personnes provenant de différentes couches sociales, hommes et femmes compris.

Naturelle ou avec des rajouts, elle compte de plus en plus d’adeptes. Pourtant les dreadlocks n’ont pas toujours fait l’unanimité et restent encore dans bon nombre d’esprits associés à des préjugés socio-culturels profonds.

Découvrons les origines de cette coiffure ancestrale et ses différentes représentations socioculturelles.

Définition et principe

Les dreadlocks, littéralement « mèches de la peur » sont une coiffure caractérisée par des mèches de cheveux emmêlés. Elles sont encore appelées dreads, locs, locks, rastas, jataa en hindoue,…

Les dreadlocks se forment seules lorsque les cheveux poussent naturellement et sans l’utilisation de brosses, peignes, rasoirs, ni ciseaux. Mais elles peuvent également être faites à l’aide d’un peigne ou d’un crochet. On peut aussi simplement crêper les cheveux avec les mains pour les réaliser. Mais dans tous les cas, elles demandent beaucoup de temps pour se former complètement.

Origine des dreadlocks à travers l’histoire

Egypte antique

La première évocation de ce style de coiffure est faite en Égypte au temps des pharaons. En effet, des représentations de dreadlocks sont retrouvées sur des sculptures en bas-reliefs, des statues et autres objets. De plus, les découvertes archéologiques démontrent que les membres de la famille royale et les hauts dignitaires politiques portaient des dreadlocks, soit au naturel ou sous forme de perruque.

• Inde

La preuve écrite de l’existence des dreadlocks est faite par la mention dans « les écritures saintes » du védisme, une croyance indienne, 2500 à 1500 ans avant J-C. Le Dieu Shiva est ses disciples y sont décrits comme des jataa; ce qui signifie « portant des nœuds de cheveux emmêlés ». Ce terme est lui-même probablement dérivé du mot dravidien catai, signifiant tortiller ou envelopper.

Le dieu Shiva
Une ascète indienne

• En Europe

Les dreadlocks sont aussi retrouvées chez les peuples germaniques, les Vikings, les Grecs ou les Celtes. Les comptables romains décrivaient les Celtes comme des personnes ayant les « cheveux comme des serpents.»

Selon un mythe, les Vikings ont cru en une fée qui attacherait leurs cheveux la nuit, et s’interdisaient alors de les peigner de peur de s’attirer le malheur ! Ils arboraient donc des dreads.

• Au Mexique

Dans la culture mexicaine, au 14ème, 15ème et 16ème siècle les prêtres de la civilisation aztèque avaient aussi des dreadlocks. William Hickling Prescott, historien américain spécialiste dans l’histoire du monde hispanique, décrivit qu’il fut reçu par six prêtres, à qui les boucles longues et emmêlées flottaient sans ordre par-dessus leurs robes.

•En Afrique

À part les égyptiens, de nombreux peuples en Afrique portaient des dreadlocks. Il s’agit entre autres des Akan, Bantous, Masaï, Peuls, Soninké, les tribus Bono, Oromo, Galla, les prêtres coptes d’Ethiopie Bahatowie ”, etc.

Chez les Wolofs par exemple, les locks étaient portées par les rois et la classe guerrière des Tiedos. Au Sénégal, les Baye Fall (les disciples du mouridisme, une confrérie de l’islam indigène au pays, fondée en 1887 par Ahmadou Bamba), affichent des dreadlocks « ndiange » et des toges multicolores.

Baye fall avec des dreads
Guerriers Mau mau
Un enfant du peuple Masaï

Dans la bible

Les premiers Chrétiens auraient également pu avoir portés cette coiffure. Particulièrement remarquables sont les descriptions de Jacques le Juste, frère du Seigneur et premier évêque de Jérusalem, qui les portaient jusqu’aux chevilles.

Une bonne partie des Rastafari explique que leurs dreadlocks proviennent d’un des trois vœux de Nazarite, dans le Livre des Nombres, le quatrième des livres du Pentateuque. « Pendant tout le temps de son naziréat, le rasoir ne passera point sur sa tête ; jusqu’à l’accomplissement des jours pour lesquels il s’est consacré à l’Éternel, il sera saint, il laissera croître librement ses cheveux. » (Nombres 6:5)

Les Nazarites qui portèrent des dreadlocks et qui furent mentionnés dans la Bible incluent les Nazarites Samuel, Jean le Baptiste, et probablement la figure biblique la plus connue avec des cheveux emmelés, Samson, qui, d’après les Saintes Écritures, eut sept locks et perdit sa grande force lorsqu’elles furent coupées.

En Jamaïque

Les derniers à porter cette coiffure au cours de l’histoire sont les Rastafaris. D’ailleurs le nom actuel dreadlocks est l’appellation jamaïcaine de cette coiffure ancienne.

Il faut cependant comprendre qu’à l’origine le mouvement Rastafari n’était pas associé au port des dreadlocks mais plutôt à celui de la barbe. Il représentait leur attachement à l’empereur éthiopien Hailé Sélassié Ier et leur caractère anti-social.

La création du Young Black Faith, un mouvement rastafari, par des jeunes jamaïcains en 1949 vient changer la donne. Ceux-ci entrent en conflit avec les autres mouvements sur de nombreuses pratiques rastafari et s’imposent. A cause de la coiffure qu’ils portaient et de la rigueur qu’ils imprimaient, les membres appelèrent leurs leaders “dreadful” (terrifiants) ou “warriors” (guerriers). D’où le nom dreadlocks plus tard.

Ce fut le port de cette coiffure par le mythique Bob Marley, rastafari et reggae man, qui popularisa les dreadlocks et l’imprima dans la culture populaire.

Bob Marley

Représentation socio-culturelle des dreadlocks

Les dreads ont eu plusieurs représentations socio-culturelles à travers les âges, les époques, et les peuples. Dans certains peuples, elles étaient portées par les familles royales et les classes sociales élevées. Elles étaient synonymes de pouvoir, royauté, noblesse, richesse, etc.

Pour d’autres elles sont l’expression profonde d’une conviction religieuse ou spirituelle, l’attachement à Dieu, la voie du détachement au matériel, et la sagesse. C’est le cas pour les sadhus (les sages hindoues) et les ascètes.

Pour d’autres encore, c’est la manifestation d’une fierté ethnique. Beaucoup d’afro descendants choisissent d’opter pour les locks pour exprimer leur appartenance à la race noire. C’est pour eux une façon de se sentir connectés à l’Afrique et à leurs ancêtres car les cheveux étaient une composante essentielle de la fierté africaine.

Cependant en Afrique, de nombreux préjugés se sont instaurés autour des locks. Ainsi, dans la conscience populaire, elles sont bien souvent assimilées à l’abus de drogue, d’alcool et au banditisme. Une personne locksée, surtout lorsqu’elle est de sexe masculin est considérée comme indigne de confiance.

Il est important que ces préjugés soient déconstruits afin de permettre aux jeunes de revendiquer leur africanité sans subir des conséquences qui ne devraient pas être. Les dreadlocks sont magnifiques et pleines de symboles. Elles sont l’expression de culture et de majesté.

Agoodojie!

Faux-locs réalisés avec des rajouts

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