Faits de Société

« La vraie beauté africaine » : la réalité vue par nos lectrices

Suite à notre article au sujet des complexes vécus par nos rédactrices Carine et Mélyssa, vous avez été.e.s nombreu.ses.x à nous faire des retours. Parmi ces retours très touchants, nombre d’entre vous n’ont pas hésité à nous ouvrir leur cœur par rapport à leurs expériences personnelles.
Nous avons donc décidé de partager avec vous ces histoires émouvantes des membres de l’Armada qui ont vécu les conséquences de leurs complexes.

Ambre: « aujourd’hui encore, je me méfie des autres »

Je m’appelle Ambre, 20ans, étudiante en médecine. Et je pèse 78 kilos : ce poids l’objet de mes hantises. 😂

Je n’ai jamais été « mince » dans mes souvenirs. Je dirai un embonpoint mais apparemment pas vraiment un embonpoint. Je m’amusais quand même bien avec mes amis au primaire et ils ne m’ont jamais fait ressentir un quelconque surpoids.

Mais à la maison, c’était plus qu’un calvaire. Il y avait un voisin qui m’a donné un surnom « gougoulouss ». Je me demande bien d’où lui est venu ce sobriquet. Pour d’autres, c’était « la grosse » ; aujourd’hui encore d’ailleurs.

Tout s’est aggravé quand j’ai commencé le collège, un collège pour filles. Le cours secondaire Notre Dame Des Apôtres. Je me suis retrouvée avec des gosses de riches top modèles. Les filles qui répondaient aux standards de la beauté. Nous autres « différentes » étions mises de côté ou on ne pensait à nous que par pitié. Je ne m’y connaissais pas en mode. L’important pour moi était de porter un vêtement qui me couvre.

J’ai grandi avec des garçons, n’ayant qu’une seule sœur qui avait sa vie à part. Je m’habillais avec de gros t-shirt, des gros vêtements pour cacher mon corps. Des vêtements tellement amples qu’on pouvait être à plusieurs dedans. J’ai commencé à me comporter en « garçon manqué ». J’ai changé ma démarche. C’était une manière pour moi de me trouver une identité. J’étais la bonne pote des quelques garçons que je connaissais. Et comme j’aimais beaucoup la lecture, c’était mon échappatoire, mon monde que je me créais.

Les études, c’était tout ce que je savais. Quand je mangeais à la maison, c’était toujours des piques « regarde comment tu es et tu veux manger de l’œuf !». Je n’avais plus le droit de prendre du yaourt, ou des petites douceurs qui m’étaient apparemment interdites vu mon poids. On ne sortait pas avec moi parce que je n’avais pas d’habits à la mode. Selon eux, Je ne savais pas m’habiller j’étais démodée.

C’était tout le temps «il faut te mettre au sport » « tu manges beaucoup trop, diminue ». J’ai finalement eu un ulcère en essayant de leur faire plaisir. Tout le temps c’est « tu grossis hein! ».

Ton poids peut fluctuer mais pas ta valeur

C’était par moi on passait pour avoir le contact de mes amies. Je ne suis pas assez belle apparemment. Aujourd’hui encore, je me méfie des autres. Je me dis qu’ils sont là juste par intérêt ou par pitié. Je n’arrive plus à m’accepter totalement. Les autres ont le droit de faire ce qu’ils veulent mais quand moi je m’y mets, ce sont des remarques désobligeantes. « La grosse ». Cette expression me hante.

Aujourd’hui, j’ai assez de complexes. Je ne porte pas des habits sans manches pour sortir ou difficilement. J’essaie de m’accepter mais, c’est encore difficile. Les quelques hommes qui s’approchent, c’est parce que apparemment j’ai les lèvres d’une « pipeuse ». 😂
J’avais 16ans quand on me l’a dit la première fois. Je ne savais même pas encore ce que ça voulait dire. On ne me trouve pas belle mais bonne au lit. Je chaperonne les autres. 😂 mais moi-même je suis devenue célibataire invétérée.

Ce sont des choses dont les autres ne réalisent pas l’impact sur les gens. Ou ils le font pour le plaisir. J’espère que cela changera et que d’autres n’auront plus à subir cela.

Hornella : « je n’ai jamais changé de forme »

Moi je n’ai jamais changé de forme. Toujours mince et tout le monde se moquait de moi tout azimut. Sans fesses ni seins, oups 😤 !

À l’école je n’avais pas d’amis; qui moi? Rien que des enfants de riches dans leur comportement, donc je restais dans mon coin, tranquille. Ces filles vont rire avec toi, mais se moquer de toi très vite sans gêne. Quand je l’ai compris, je ne parlais plus, la distance est devenue plus longue. Mais là encore les cachotteries ont commencé par sortir…😤

Elles, elles avaient de l’argent, elles mangeaient tout, ne faisaient rien à la maison, et grossissaient avec les formes. Elles se tressaient, moi je me rasais le crâne: c’était les moqueries à haute dose, mais j’ai supporté. Je ne portais rien qui me faisais me sentir à l’aise. Elles viendront toujours rire en disant : « est-ce que toi tu vas grossir ? » « Le truc est gros, ou encore, tu ne sais pas t’habiller ? ».

Je ne participais à aucune activité de l’école, journées culturelles et autres jamais, qui ? Moi? Non. Bref, après j’ai zappé tout le monde. Palabre ou pas, mon cahier est devenu mon réconfort. Jusqu’à maintenant on me dit toujours : « tu manges où ? dans tes os? » « Tu ne grossis jamais ».

J’ai tellement pris de vitamines, mais sans effet. J’ai lu un jour qu’à trop en prendre, vu que je n’ai pas encore accouché, je grossirai de trop, parce que tout cela va prendre effet. Il était donc préférable d’arrêter. Un médecin généraliste m’a dit un jour : « quand tu vas accoucher tu vas grossir, donc arrête avec les vitamines. Tu seras de trop après et ton mari va s’énerver et tu vas encore chercher à mincir ». Finalement, je reste comme je suis calmement et je remercie Dieu.

La société crée en nous des complexes qu’il est parfois difficile de surmonter. Malgré toute la force et le courage dont nous pouvons faire preuve, les moqueries laissent toujours une trace en nous, une cicatrice bien souvent tenace.

Alors essayons du mieux que nous pouvons, d’être tolérants envers nous mêmes et envers les autres. Personne ne choisit le corps dans lequel il naît. Les standards de beauté, d’une société à une autre définissent un corps idéal, tantôt mince, tantôt sulfureux et tout en courbes. Ce corps idéal est illusoire et loin de la réalité des millions de femmes qui existent dans le monde.

Apprenons donc à faire preuve de compassion, à nous accepter nous-mêmes ainsi que les autres tels qu’ils sont. Évitons de nous rabaisser mutuellement et normalisons nos corps quelque soit leur forme.

Ton corps mérite ton amour inconditionnel

AGOODOJIÉ ! 🤍

1 réflexion au sujet de “« La vraie beauté africaine » : la réalité vue par nos lectrices”

  1. Merci pour ces témoignages ! Et on voit bien à quel point ces injonctions sont stupides…

    Tantôt il faut être mince et faire des régimes…

    Tantôt il faut être grosse et prendre des vitamines…

    Mais qu’on lâche la grappe au corps des femmes !

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